L’ange-enfant

Ils poussent des clameurs et combattent, ils doutent et désespèrent, il n’y a point de fin à leurs querelles.

Que ta vie, mon enfant, apparaisse au milieu d’eux comme la flamme d’une lumière intense et pure et que, ravis, ils se taisent !

Ils sont cruels, avides et pleins d’envie, leurs paroles sont comme des poignards cachés, altérés de sang.

Va vers ces cœurs tourmentés, tiens-toi au milieu d’eux, mon enfant, que ton regard serein s’abaisse sur eux, comme la paix miséricordieuse des soirs descend sur le jour et met fin à ses luttes.

Qu’ils voient ton visage, mon enfant, et qu’ainsi ils comprennent le sens de toutes choses ; qu’ils t’aiment et qu’ainsi ils s’aiment l’un l’autre.

Viens prendre la place qui t’attend dans l’infini des choses, mon enfant. À l’aurore, ouvre ton cœur et élève-le comme une fleur qui s’épanouit ; au coucher du soleil, incline la tête et, dans le silence achève le jour et son adoration.

 

Par Rabîndranâth Tagore dans « La jeune lune »

Traduction par Henriette Mirabaud-Thorens
NRF, 

 

Image : [Représentation de la lune dans son plein] : [estampe] / [gravé par Jean Patigny]

L’opéra de la lune

Les éditions Gallimard ont eu la bonne idée de rééditer au format poche « L’opéra de la lune » de Jacques Prévert.

Ils sont nombreux les enfants des années cinquante à se rappeler ce livre. Il s’agit d’une reproduction à l’identique de la première édition publiée en 1953 par la Guilde du Livre, ainsi qu’une partition de la « Chanson dans la lune ». Il faut absolument avoir cet ouvrage chez soi ou courir l’emprunter dans une bibliothèque.

Et pourquoi vous dites que je suis dans la lune ? 
Par ici on ne dit pas qu’on est est dans la terre !
Personne n’est jamais dans la terre
sauf les mineurs qui tirent pour les autres les marrons du feu de l’Hiver.

Un petit garçon orphelin s’invente pour s’endormir des fééries lunaires, d’une originalité absolue. Le texte à la fois poétique et narratif, triste et drôle, et les illustrations de Jacqueline Duhême sont un régal absolu.  La rêverie n’en exclut pas un regard de la plus grande clairvoyance sur le monde et la société, à travers les yeux du personnage principal.

Je revois papa et maman.
– Mais comment peux-tu les revoir puisque tu ne les as jamais vus ? 
Tout de suite, je les ai reconnus.

 L’image est aussi importante que le texte dans ce récit qui oppose le gris de la ville contemporaine aux couleurs flamboyantes d’une lune fantasmatique, pays de joie et de danse. Un grand classique, à placer juste à côté du « Petit Prince » de Saint-Exupéry afin que ces deux enfants puissent mutuellement se rencontrer et s’apprivoiser.

Plus d’informations sur le site de l’éditeur