Un rêve de Socrate

Il a été dit, et répété, que Socrate n’a pas écrit.

Marcheur infatigable dans les rues d’Athènes, il pose ses questions
de philosophe, associant vivement l’autre à sa recherche.
En toute injustice, le voilà condamné à mort, par sa cité même.

Socrate dans sa prison choisit de se retrouver seul, en sa quête
ultime de vérité. Il n’est plus père, ni fils, ni époux. Il est seul pour écouter les dieux, seul
pour accueillir ses rêves, seul avec la nuit et ses messages.

Or pendant son sommeil, plusieurs fois, il est invité à s’intéresser à la
musique.

La musique? Qu’est-elle pour lui, l’homme dont le souci est le vrai,
par la parole vive?

Pour Socrate, d’évidence, c’est dans la poésie que la musique est
présente.

L’enfant qu’il fut se souvient des fables d’Ésope, porteuses
de tant de vérités humaines. Ne sont-ils pas frères en leur destin?
Il rend hommage à l’esclave, en traduisant en vers chantants
la juste prose du fabuliste.

Socrate a entendu la nuit et son message. Il est en paix.

Il va boire la ciguë.

Par Françoise Kerisel

Ce poème réflexif lui a été inspiré par la célèbre préface aux fables de Jean de La Fontaine dans laquelle ce dernier « évoque longuement, avec force, ce rendez-vous de Socrate avec l’écriture poétique, avec la muse, avec la nuit,
avec les rêves à entendre comme porteurs des messages essentiels, à déchiffrer.  »

Image : [Vignette, fumé pour l’illustration de : La Fontaine, Jean de, « Fables », « Testament expliqué par Esope »] : [estampe] ([Fumé]) / G. Doré