Un rêve de Socrate

Il a été dit, et répété, que Socrate n’a pas écrit.

Marcheur infatigable dans les rues d’Athènes, il pose ses questions
de philosophe, associant vivement l’autre à sa recherche.
En toute injustice, le voilà condamné à mort, par sa cité même.

Socrate dans sa prison choisit de se retrouver seul, en sa quête
ultime de vérité. Il n’est plus père, ni fils, ni époux. Il est seul pour écouter les dieux, seul
pour accueillir ses rêves, seul avec la nuit et ses messages.

Or pendant son sommeil, plusieurs fois, il est invité à s’intéresser à la
musique.

La musique? Qu’est-elle pour lui, l’homme dont le souci est le vrai,
par la parole vive?

Pour Socrate, d’évidence, c’est dans la poésie que la musique est
présente.

L’enfant qu’il fut se souvient des fables d’Ésope, porteuses
de tant de vérités humaines. Ne sont-ils pas frères en leur destin?
Il rend hommage à l’esclave, en traduisant en vers chantants
la juste prose du fabuliste.

Socrate a entendu la nuit et son message. Il est en paix.

Il va boire la ciguë.

Par Françoise Kerisel

Ce poème réflexif lui a été inspiré par la célèbre préface aux fables de Jean de La Fontaine dans laquelle ce dernier « évoque longuement, avec force, ce rendez-vous de Socrate avec l’écriture poétique, avec la muse, avec la nuit,
avec les rêves à entendre comme porteurs des messages essentiels, à déchiffrer.  »

Image : [Vignette, fumé pour l’illustration de : La Fontaine, Jean de, « Fables », « Testament expliqué par Esope »] : [estampe] ([Fumé]) / G. Doré

Ecoute mon coeur

« Écoute, mon coeur…. » Le poème de Rabindranath Tagore,  traduit en français par Mme Hélène Du Pasquier, est devenu un morceau chanté et joué à la flûte sur une composition d’André Caplet… Où musique et poésie se rejoignent en chanson…
Soprano: Michèle Laporte. Flûte traversière: Pascal Le Bourdonnec. Enregistré dans l’église Saint-Vivien (Saintes) le 11 mars 1990.


 

Image :Rabindranathagor, poète hindou : [photographie de presse] / Agence Meurisse

Et pour en savoir plus sur Rabindranath Tagore (1861 – 1941), on peut réécouter cette émission de France Culture diffusée en 2012

Aux arbres

Un célèbre poème de Victor Hugo
mis en musique par RymS

Aux arbres

 

Arbres de la forêt, vous connaissez mon âme!
Au gré des envieux, la foule loue et blâme ;
Vous me connaissez, vous! – vous m’avez vu souvent,
Seul dans vos profondeurs, regardant et rêvant.
Vous le savez, la pierre où court un scarabée,
Une humble goutte d’eau de fleur en fleur tombée,
Un nuage, un oiseau, m’occupent tout un jour.
La contemplation m’emplit le coeur d’amour.
Vous m’avez vu cent fois, dans la vallée obscure,
Avec ces mots que dit l’esprit à la nature,
Questionner tout bas vos rameaux palpitants,
Et du même regard poursuivre en même temps,
Pensif, le front baissé, l’oeil dans l’herbe profonde,
L’étude d’un atome et l’étude du monde.
Attentif à vos bruits qui parlent tous un peu,
Arbres, vous m’avez vu fuir l’homme et chercher Dieu!
Feuilles qui tressaillez à la pointe des branches,
Nids dont le vent au loin sème les plumes blanches,
Clairières, vallons verts, déserts sombres et doux,
Vous savez que je suis calme et pur comme vous.
Comme au ciel vos parfums, mon culte à Dieu s’élance,
Et je suis plein d’oubli comme vous de silence!
La haine sur mon nom répand en vain son fiel ;
Toujours, – je vous atteste, ô bois aimés du ciel! –
J’ai chassé loin de moi toute pensée amère,
Et mon coeur est encor tel que le fit ma mère!

Arbres de ces grands bois qui frissonnez toujours,
Je vous aime, et vous, lierre au seuil des autres sourds,
Ravins où l’on entend filtrer les sources vives,
Buissons que les oiseaux pillent, joyeux convives!
Quand je suis parmi vous, arbres de ces grands bois,
Dans tout ce qui m’entoure et me cache à la fois,
Dans votre solitude où je rentre en moi-même,
Je sens quelqu’un de grand qui m’écoute et qui m’aime!
Aussi, taillis sacrés où Dieu même apparaît,
Arbres religieux, chênes, mousses, forêt,
Forêt! c’est dans votre ombre et dans votre mystère,
C’est sous votre branchage auguste et solitaire,
Que je veux abriter mon sépulcre ignoré,
Et que je veux dormir quand je m’endormirai.

L’opéra de la lune

Les éditions Gallimard ont eu la bonne idée de rééditer au format poche « L’opéra de la lune » de Jacques Prévert.

Ils sont nombreux les enfants des années cinquante à se rappeler ce livre. Il s’agit d’une reproduction à l’identique de la première édition publiée en 1953 par la Guilde du Livre, ainsi qu’une partition de la « Chanson dans la lune ». Il faut absolument avoir cet ouvrage chez soi ou courir l’emprunter dans une bibliothèque.

Et pourquoi vous dites que je suis dans la lune ? 
Par ici on ne dit pas qu’on est est dans la terre !
Personne n’est jamais dans la terre
sauf les mineurs qui tirent pour les autres les marrons du feu de l’Hiver.

Un petit garçon orphelin s’invente pour s’endormir des fééries lunaires, d’une originalité absolue. Le texte à la fois poétique et narratif, triste et drôle, et les illustrations de Jacqueline Duhême sont un régal absolu.  La rêverie n’en exclut pas un regard de la plus grande clairvoyance sur le monde et la société, à travers les yeux du personnage principal.

Je revois papa et maman.
– Mais comment peux-tu les revoir puisque tu ne les as jamais vus ? 
Tout de suite, je les ai reconnus.

 L’image est aussi importante que le texte dans ce récit qui oppose le gris de la ville contemporaine aux couleurs flamboyantes d’une lune fantasmatique, pays de joie et de danse. Un grand classique, à placer juste à côté du « Petit Prince » de Saint-Exupéry afin que ces deux enfants puissent mutuellement se rencontrer et s’apprivoiser.

Plus d’informations sur le site de l’éditeur